• Portraits de chercheurs Carnot MERS,

Salomé FABRI RUIZ, unité HALGO de l'Ifremer

Publié le 20 janvier 2025 Mis à jour le 4 février 2025
Comparaison de l'ADNe et l'ARNe pour l'optimisation du suivi des parcs éoliens et de leurs impacts sur la population marine.
Salomé Fabri Ruiz, chercheuse à l'Ifremer Nantes

Salomé Fabri Ruiz, chercheuse à l'Ifremer Nantes


Quel est ton parcours dans la recherche ?

Après un master en Océanographie et Environnement marin à Sorbonne Université (2014) et un CDD d’ingénieure au Muséum National d’Histoire Naturelle, j’ai obtenu une bourse ministérielle pour un doctorat en cotutelle entre l’Université de Bruxelles et l’Université de Bourgogne Franche-Comté (2015-2018). Pendant 3 ans, j’ai étudié l’impact du changement climatique sur les oursins de l’océan Austral. J’ai ensuite enrichi mon parcours par deux post-doctorats au Laboratoire d’Océanographie de Villefranche-sur-Mer (2019-2020) et un ATER à Sorbonne Université (2020-2021). Depuis 2021, je suis chercheuse permanente à l’Ifremer à Nantes, où je travaille sur l’impact des activités humaines sur les écosystèmes marins et développe des outils d’observation innovants.

Ce qui m’anime dans la recherche, c’est la stimulation intellectuelle qu’elle procure et la satisfaction de contribuer à enrichir les connaissances pour éclairer les décideurs et accompagner les grands enjeux sociétaux. Je suis motivée au quotidien par le travail d’équipe, le partage d’idées et la dimension collaborative et internationale de ce métier.

Sur quel projet de recherche Carnot MERS travailles-tu en ce moment ?

Les parcs éoliens offshore se développent rapidement en Europe pour répondre aux enjeux de souveraineté énergétique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, avec un objectif de 300 GW d'ici 2050 pour l’Union Européenne. Ces infrastructures, situées dans des environnements marins, nécessitent la réalisation de suivis environnementaux pour évaluer leur impact sur les populations de poissons. Les méthodes classiques comme le chalutage sont limitées, voire interdites. L'ADN environnemental (ADNe) constitue une alternative prometteuse : cette méthode permet de détecter des espèces via leur matériel génétique présent dans l'eau, offrant un échantillonnage non invasif et précis. Cependant, des défis subsistent, notamment liés à la grande stabilité de l’ADNe, qui peut migrer sur de longues distances et fausser l'estimation des populations locales. L’ARN environnemental (ARNe), plus instable, pourrait surmonter ces limites. Le projet de recherche que je mène compare ces deux approches sur des échantillons prélevés en aquarium afin d’évaluer leur pertinence dans le cadre des suivis des parcs éoliens.

Quelle en serait l’utilité pour un industriel du secteur maritime ?

Les obligations réglementaires imposées aux industriels du secteur maritime, notamment la réalisation de suivis environnementaux à long terme pour évaluer l’impact de leurs infrastructures sur les écosystèmes, nécessitent le développement de nouvelles approches adaptées aux contraintes spécifiques des parcs éoliens. Les résultats de ce projet de recherche alimenteront les réflexions sur la mise en place de systèmes de surveillance des populations de poissons basés sur des techniques innovantes telles que l’ADN et l’ARN environnementaux, qui offrent une alternative non invasive aux méthodes traditionnelles comme le chalutage, interdit dans ces zones. Il sera néanmoins essentiel de valider ces techniques in situ, dans des conditions réelles, pour garantir leur fiabilité et leur transférabilité au milieu naturel.

Pourquoi as-tu choisi de travailler dans la recherche académique ?

La recherche académique offre un cadre pour explorer de nouvelles idées, poser des questions fondamentales et apporter des réponses innovantes. Elle me permet de contribuer à l’avancée des connaissances, tout en ayant le sentiment d’être utile en travaillant sur des enjeux environnementaux et sociétaux importants. J’apprécie énormément la dimension collaborative de la recherche, car elle me permet d’échanger avec des experts aux compétences variées, ce qui stimule ma réflexion tout en étant une expérience enrichissante sur le plan humain.

Que penses-tu de la recherche académique au regard des défis auxquels sont confrontés les industriels ?

La recherche académique, par sa liberté d’exploration et son approche à long terme, peut se concentrer sur des concepts innovants et fondamentaux, souvent inaccessibles aux industriels en raison des contraintes de rentabilité ou des délais de mise en œuvre. Ces travaux, réalisés sur des échelles de temps généralement beaucoup plus longues, sont indispensables pour faire avancer les connaissances. En fournissant des bases théoriques solides et en explorant des technologies émergentes, la recherche académique permet aux industriels de se positionner stratégiquement sur des projets d’innovation ambitieux. Par ailleurs, la science ouverte issue de ces travaux, souvent disponible en libre accès, constitue une ressource précieuse que les industriels peuvent utiliser pour développer leurs projets.

Quel est l'objet qui définit le mieux qui tu es, ou ton activité ?

Une tasse de café ! Non je ne suis pas accro à la caféine mais beaucoup de mes idées germent autour d’un café avec des collègues ou en conférence. Elle symbolise bien la dimension collaborative de la recherche académique.
 
prelevement ADN
test adn

Filtration de l'eau de mer des aquariums : L'ADN et l'ARN environnemental sont capturées sur des filtres (à gauche) puis stabilisés avec un tampon (à droite) avant d'être analysées.


Publié le 20 janvier 2025 Mis à jour le 4 février 2025